Communiqué de presse du 15 novembre 2019
Nous apprenons le 12 novembre par voie de presse que la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement) a transmis un Procès-Verbal au Parquet de Paris ainsi qu’au Préfet, relevant plusieurs infractions sur le site Lubrizol :
– les systèmes de détection incendie dans les zones de stockages extérieurs auraient manqué.
– le scénario du 26 septembre n’aurait pas été anticipé.
– la réserve d’eau sur le site pour les pompiers aurait été insuffisante, les pompiers ont dû se connecter au réseau public via les bouches d’incendie, puis dans la Seine.
– les déversoirs n’auraient pas été suffisamment importants pour recueillir les eaux polluées suite à l’intervention des pompiers.
– les systèmes de caniveau étaient inexistants, provoquant une pollution de la Seine par la coulée des hydrocarbures.
Or le lendemain, Frédéric Henry, président de Lubrizol estime que « si nous [l’usine] ne redémarrons pas, nos clients iront voir ailleurs ».
Cependant, comme l’ont exprimé Cyrille Moreau et Jean-Michel Bérégovoy à l’audition du Préfet lors de la mission d’information parlementaire à l’Assemblée Nationale du 30 octobre 2019, un certain nombre de risques ne sont toujours pas pris en compte :
- Sur l’amiante, des obligations très lourdes pèsent aujourd’hui sur les particuliers, mais pas sur les industriels. Lors de l’incendie, on a pu constater une dispersion de la toiture fibrociment de l’entrepôt amiantée un peu partout en Ville. Qu’en est-il du reste du site ?
- Le risque inondation a également été évoqué Il est important de réactualiser le risque technologique à la lumière du TRI (Territoire à Risque Important inondation), qui lui-même doit prendre en compte les prévisions d’augmentation du niveau des eaux liées au réchauffement climatique, prévisions revues à la hausse selon le travail de l’organisation Climate Central publié dans Nature Communication le 29 octobre 2019.1
- Le risque terroriste, et notamment la menace des drones doit être prise en compte. Aujourd’hui aucun document, du PPI au PPRT ne prennent en compte ce risque. Un départ de feu, une petite explosion dans un entrepôt de stockage – à plus forte raison non couvert par un système de détection incendie – pourrait avoir des conséquences encore plus dramatiques que celles que nous avons connu si des produits spécifiques étaient ciblés.
La menace à l’emploi est inacceptable de la part d’un président qui n’a pas su protéger efficacement les habitants de la Métropole, y compris les salariés qui travaillent sur le site. L’impact économique estimé par le président de la société Lubrizol touchant directement ou indirectement près de 2200 personnes est aujourd’hui largement dépassé. La ville de Toulouse a perdu en attractivité suite à AZF, il serait surprenant que l’image de Rouen s’en sorte mieux dans l’avenir proche à moins de prises de positions fortes de la part des autorités. Il nous faudra réinventer la ville dans l’ensemble de ses fonctionnalités et notamment son industrie afin qu’elle soit plus conforme aux grands objectifs du siècle.
En conséquence, il faut que le site soit absolument réaménagé selon les normes maximales de sécurité si l’on souhaite une réouverture. Dans le cas contraire, le site ne doit pas rouvrir dans l’intérêt des habitants et des salariés de l’usine. Car ce n’est pas à la Ville de s’adapter au site, mais au site de s’adapter à la Ville. Et pour l’instant, à la lumière de l’arrêté de mise en demeure de la Préfecture du 8 novembre et des constatations de la DREAL, ce n’est pas le cas.
Françoise LESCONNEC & Jean-Michel BEREGOVOY