Conseil municipal du 22 janvier 2018
Motion d’urgence présentée par le groupe Décidons Rouen
Contre le « tri » dans les centres d’hébergement
Depuis plusieurs mois, de nombreux demandeurs d’asile se retrouvent sans hébergement à Rouen et dans sa Métropole, sujet sur lequel nous avons à de nombreuses reprises alerté l’Etat et l’opinion locale. Pour pallier la défaillance de l’Etat en matière d’hébergement des demandeurs d’asile, un collectif de citoyennes et citoyens, accompagné par la ville de Rouen, se mobilise depuis juin dernier afin de répondre du mieux possible aux besoins de base des personnes, de les accompagner dans leurs démarches administratives et de fournir à certains d’entre eux un hébergement, dans des conditions malheureusement insatisfaisantes.
Alors que l’Etat ne remplit toujours pas ses missions d’hébergement des personnes les plus précaires, cette situation risque de s’aggraver dans les mois qui viennent suite à la publication de deux circulaires en décembre dernier, prévoyant l’identification de la situation administrative des personnes vivant dans les centres d’hébergement en y envoyant des « équipes mobiles » de la préfecture, et la « redirection » de ces personnes vers une solution « adaptée ». Par solution le ministre de l’Interieur Gérard Collomb, soutenu au plus haut niveau de l’Etat, entend surtout sortir des centres d’hébergement les personnes qui n’auraient pas de papiers en règle.
Nous tenons à rappeler qu’en France, on ne demande pas de papiers d’identité avant d’héberger. Le principe de l’accueil inconditionnel est fondateur de l’action sociale en France, en particulier de l’aide aux plus démunis. C’est l’honneur de notre pays d’avoir inscrit dans sa loi que c’est la situation de détresse sociale d’une personne qui doit déterminer son accueil dans un centre d’hébergement, et non son statut administratif.
Or les circulaires de décembre 2017 bafouent ce principe.
Nous savons que le ministre Collomb s’est empressé de donner les consignes aux services de la préfecture pour que cette dernière annonce la venue des services de l’Etat dans les centres d’hébergement, malgré l’opposition des associations et fédérations d’associations concernées.
Ces circulaires résulteront dans la remise à la rue de personnes et de familles en grande pauvreté, avec des enfants parfois en très bas âge. D’autres, en souffrance psychique, ne pourront plus bénéficier de l’accompagnement existant en centre d’hébergement.
Par cette motion, le conseil municipal :
– Déclare qu’il s’oppose à ces pratiques qui mettront en danger les personnes les plus précaires de notre société, et dont le but véritable est bien d’expulser massivement des personnes vers des pays qu’elles ont fuis au péril de leur vie.
– Réaffirme son soutien aux travailleurs sociaux, aux associations et aux citoyennes et citoyens qui se mobilisent en faveur de l’accès aux droits des personnes précaires et de leur intégration. Nous soutenons les nombreuses associations qui ont déposé un recours auprès du conseil d’Etat pour faire annuler ces circulaires, et sommes aux côtés des associations qui résisteront à l’application de ces circulaires, indignes du pays des droits de l’homme
– Demande à l’Etat de prendre ses responsabilités en augmentant les moyens dédiés à l’hébergement d’urgence ainsi qu’à l’accueil des demandeurs d’asile, notamment au premier accueil dont les délais sont inacceptables à Rouen et en créant des places d’hébergement en CHRS et en CADA sur la métropole Rouen-Normandie, qui manquent cruellement contrairement aux affirmations du Député Damien Adam.
– Soutient par ailleurs les revendications des maires de grandes villes de tous bords politiques (parmi lesquels Alain Juppé, Martine Aubry, Jean-Luc Moudenc, Eric Piole, Roland Ries, Nathalie Appéré, Johanna Roland, etc.), qui demandaient dans le Monde le 16 décembre dernier une mobilisation accrue de l’Etat dans l’accueil et l’intégration des migrants, et la création d’un réseau solidaire entre les villes de France.
– Demande que l’Etat ouvre une réflexion sur la régularisation des nombreuses personnes dont la vie est en France depuis plusieurs années et qui ne peuvent sortir de l’hébergement d’urgence faute de papiers. Nous pensons notamment aux familles dont les enfants sont scolarisés en France.
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